Conclusion
Vers une nouvelle représentation : de l’homme grégaire à l’homme averti.

Caricature d’André François
Nouvel Observateur 1972


Dans l’ère nouvelle de mondialisation qui s’installe sur la planète depuis le premier tiers du XXème siècle, et plus récemment de la nouvelle économie, il convenait  en effet de se poser la question du rôle que peuvent encore jouer des organismes internationaux comme la BDIC ?

En parcourant les manifestations notamment conflictuelles et guerrières des siècles passés, on constate que les pouvoirs successifs qui se sont développés ont été « habités » par une perception et une représentation de plus en plus globalisantes du monde. Certes avec des reculs temporaires, voire des oppositions à cette sorte d’idéologie de la conquête, l’emprise de leur représentation globalisante s’est manifestée dans tous les domaines, le politique d’abord, le géopolitique, l’économique, la finance, les religions, les idéologies, etc.

L’étude des siècles précédents nous fait découvrir une succession d’empires, les Perses et les Grecs, les conquêtes d’Alexandre jusqu’en Afghanistan, Byzance, Rome et plus près de nous Napoléon et Hitler …

Sur un autre plan, les représentations du monde de Copernic et de Galilée avaient révolutionné les croyances et mis à mal des acquis doctrinaux : ce n’était d’ailleurs pas sans risque, car les " découvreurs " étaient menacés du bûcher et des pires tortures de l’Inquisition s’ils  s’opposaient à des puissances religieuses omnipotentes. Des pouvoirs partisans ont en effet contrecarré ces évolutions inéluctables, souvent à leur profit ; citons en particulier l’emprise du Vatican,  celle de l’Internationale communiste depuis le XIXème siècle, sur une grande partie du monde ; citons plus récemment la résurgence de l’Islam et de ses extrémistes inquiétants.

Carte du monde présentant les
possessions coloniales en 1945.
Documentation française
Par ailleurs il est curieux de constater, si l’on ne l’explique pas par un appétit de gain et un désir immodéré de pouvoir, que des Etats–Nations du XIXème et du XXème siècle avec leurs frontières, leurs guerres sanglantes, dans lesquelles l’individu était sacrifié « sur l’autel de la Patrie », se sont livrés presque tous, britanniques, français, belges, hollandais, italiens, allemands (Cameroun 1884-1914) etc., à la conquête d’une partie de territoires ou de continents, comme le révèlent les cartes multicolores des empires coloniaux de 1850 à 1962 (jaune, rose, blanc, orange, vert…). 

L’Amérique même, avec sa puissance économique, militaire et ses dollars, maintient encore son hégémonie et la développe au travers de sa langue, l’anglais, et de ses invasions culturelles, le cinéma en particulier ; elle avait été pourtant la première au XVIIIème  siècle à faire sa révolution.
D’autres puissances, d’autres continents avec leurs millions d’hommes, tels que la Chine et l’Inde « jouent déjà  dans la  cour des Grands » ; l’évolution économique et relationnelle actuelle de la Chine en particulier en est un exemple.

Cependant des projets d’organisation inter-nationaux  ont été mis sur pied pour modérer de tels appétits : en 1925 les accords de Locarno et la création de la Société des Nations, garante de la paix, avaient un temps amélioré les relations entre les peuples ; citons dans la foulée et dans cet esprit, la création du Comité franco-allemand et du Comité français de coopération européenne (1926) avec en particulier les concours de André Honnorat, Camille Bloch, Pierre Renouvin et Georges Bourdon secrétaire général de la SHG. D’autres organismes, après la Seconde guerre mondiale, ont été créés tels que l’ONU, le FMI, le GATT, la FAO, le Traité de Rome, etc. : ils avaient pour objet de réguler l’équilibre des différentes puissances/nations du monde, d’établir un ordre économique et financier plus satisfaisant, au bénéfice des pays en voie de développement, notamment de leurs populations ; ces objectifs devaient renforcer la paix dans la perception d’un monde global, promouvoir une sorte de « village planétaire » dans lequel, auprès des gouvernants, on reconnaîtrait l’unicité et le destin individuel des hommes. 

Déjà  dans  l’analyse  des causes  et des conséquences de la  Première  guerre  mondiale, une perception de nouveaux rapports était apparue, nous l’avons vue, entre les nations, entre les continents, puisque dès 1917 le conflit s’était internationalisé de l’Amérique à l’Asie, ancré trois ans plus tôt dans un épicentre géopolitique, occidental et européen ; on ne pouvait plus envisager de supporter les tueries de 14-18, les millions de morts et de mutilés de tous les pays belligérants et l’incompétence des chefs de guerre qui menaient les hommes à l’abattoir.
A cette prise de conscience des dirigeants et de leur peuple, s’est ajoutée la révolution numérique de la communication qui a accéléré cette nouvelle représentation et la met en partie à la portée des citoyens ; l’application par ailleurs de la Nouvelle économie ne pourra être acceptée, cependant, au plan mondial que si les peuples les  plus pauvres   ont   le sentiment d’y participer, comme le réclament les alter-mondialistes, héritiers en cela du courant trotskiste.

La mondialisation et ses ennemis par Daniel Cohen 
En conclusion de son ouvrage sur La mondialisation et ses ennemis Daniel Cohen écrit : « Mais le monde ne sera jamais juste tant que les peuples n’auront pas la conviction qu’ils contribuent à la découverte et à la fabrication d’un destin humain partagé  et ne pourront dire : tout ce que nous parvenons à comprendre des productions humaines devient aussitôt un élément de notre patrimoine culturel. Je suis fier de mon humanité chaque fois que je suis en mesure d’apprécier des poètes et des artistes d’autres pays que le mien. Ecrit par le souverain indien Ashoka, et valable pour l’éternité ».

Vouloir comprendre s’impose pour la survie des peuples, pour l’épanouissement des hommes sur le plan intellectuel, moral et économique ; et l’histoire nous apprend que la majeure partie des anciens belligérants de la Grande guerre souhaitaient déjà ardemment « le point de départ d’une ère nouvelle pour l’humanité1». 

En terminant cet article sur l’histoire des représentations du XXème siècle et du XXIème siècle commençant, il convient de conforter, voire d’organiser des "BDIC" partout dans le monde, " pour veiller au grain " et conjurer les conflits, si préjudiciables au destin des hommes qu’ils victimisent et finissent par broyer, à l’instar des grandes machines de guerre incontrôlées. L’actualité récente qui enregistre une croissance économique et financière insoupçonnée, il y a peu, des pays d’Asie et d’Amérique latine d’une part, et l’éveil des populations du monde arabe d’autre part, devrait inciter les pays occidentaux, maitres jusque-là du monde, à une plus grande attention dans le partage de la gouvernance mondiale, s’ils veulent éviter des conflits destructeurs irréversibles.
Contre l’immobilisme, bander ses énergies.

Cardon. Ne pas attendre… l’ensablement, l’enlisement


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1.Discours d’inauguration de la BMG au Château de Vincennes, du 27 juin 1925, par A.Honnorat

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